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Les dangers de dormir la bouche ouverte

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Dormir la bouche ouverte est une habitude répandue qui peut sembler anodine au premier abord, mais qui comporte de nombreux risques méconnus pour la santé, à court et long terme. En effet, respirer par la bouche pendant le sommeil entraîne une sécheresse de la gorge et de la bouche, une diminution de la protection naturelle des dents, des infections et inflammations buccales, des troubles du sommeil, et à long terme des problèmes respiratoires et cardiovasculaires graves.

Cet article se propose de faire le tour des causes, des conséquences délétères, et des solutions thérapeutiques qui existent pour corriger cette habitude très répandue de dormir la bouche ouverte.

Causes et facteurs de risque

Plusieurs facteurs de risque peuvent favoriser l’apparition et le maintien d’une respiration buccale nocturne :

A. Obstruction mécanique des voies aériennes supérieures

De nombreuses affections ORL obstructionnelles sont source d’une obligation à respirer par la bouche pendant le sommeil :

  • Une déviation importante de la cloison nasale entrave le passage de l’air dans les fosses nasales. Cette déviation peut être congénitale ou secondaire à un traumatisme facial.

  • L’hypertrophie chronique des végétations adénoïdes est fréquente chez l’enfant. Ces excroissances obstruent le passage de l’air dans le rhinopharynx.

  • La présence de polypes nasaux volumineux dans les fosses nasales empêche également une respiration nasale efficace. Ces polypes sont favorisés par une allergie sous-jacente, une inflammation chronique des sinus, ou un terrain atopique.

  • Toute infection ou inflammation ORL aiguë ou chronique va obstruer les voies aériennes supérieures : rhinite allergique ou infectieuse, sinusite aiguë ou chronique, laryngite, trachéite, épiglottite…

B. Troubles obstructifs du sommeil

  • Le ronflement est un signe de vibration anormale des tissus mous du pharynx pendant le sommeil. Cette vibration augmente la résistance au passage de l’air et oblige à respirer par la bouche pour compenser.

  • Le syndrome d’apnée obstructive du sommeil (SAOS) est une cause majeure de respiration buccale nocturne. Durant les apnées, le pharynx s’affaisse complètement sous l’effet de la détente musculaire, empêchant toute respiration. Ces épisodes répétés mènent à un micro-réveil en ouvrant la bouche pour permettre la reprise respiratoire.

C. Troubles morphologiques crânio-faciaux

Certains défauts structurels des maxillaires ou du massif facial peuvent prédisposer à respirer par la bouche :

  • Un rétrognathisme (mâchoire inférieure trop en retrait)
  • Une brièveté du voile du palais
  • Un palais ogival (palais étroit et profond en forme de voûte)

D. Posture pendant le sommeil

  • Dormir en position couchée sur le dos favorise la chute de la base de langue en arrière contre le mur du pharynx. Cette obstruction relative oblige à respirer par la bouche.

E. Prise de médicaments

De nombreux médicaments ont pour effet secondaire d’assécher les sécrétions salivaires et muqueuses :

  • Décongestionnants nasaux
  • Antihistaminiques
  • Antidépresseurs
  • Anxiolytiques
  • Neuroleptiques
  • Somnifères
  • Etc.

F. Autres facteurs irritants

  • La consommation tabagique chronique irrite et inflamme les voies aériennes.

  • La consommation d’alcool augmente le relâchement musculaire des voies aériennes supérieures.

Conséquences d’une respiration buccale nocturne

Respirer par la bouche de façon chronique pendant le sommeil a de nombreuses conséquences néfastes sur la santé, aussi bien locale que générale.

A. Conséquences bucco-dentaires

  • La respiration buccale nocturne entraîne une baisse importante de la sécrétion salivaire, car la stimulation mécanique et chimique de la salivation par l’air est moindre. Cette hyposialie se traduit par une sécheresse buccale désagréable au réveil, appelée xérostomie.

  • La salive ayant un rôle protecteur et reminéralisant sur l’émail dentaire, sa diminution fragilise la surface des dents. L’environnement buccal devient plus acide et propice à la déminéralisation et aux caries, surtout au niveau des collets dentaires et des zones de contact inter-dentaires.

  • L’inflammation chronique de la muqueuse buccale (stomatite) et l’halitose (mauvaise haleine) sont également des conséquences fréquentes.

B. Conséquences ORL

  • La sécheresse des muqueuses respiratoires entraîne une irritation chronique de la gorge (pharyngite) avec sensation de gorge sèche et douloureuse, surtout le matin au réveil.

  • L’inflammation de la muqueuse de la gorge favorise les infections aiguës comme les angines à répétition ou les laryngo-trachéites.

C. Conséquences respiratoires

  • Le passage obligé de l’air par la bouche court-circuite les fonctions de réchauffement, d’humidification et de filtration de l’air assurées par le nez. L’arrivée d’un air sec et non filtré dans les poumons est source d’irritation bronchique.

  • À long terme, la respiration buccale entretient l’obstruction nasale et les ronflements. Elle peut conduire à un cercle vicieux entre inflammation ORL, obstruction, et obligation de respirer par la bouche. Ce cercle auto-entretenu aggrave progressivement les troubles obstructifs du sommeil.

  • Dans les cas extrêmes, une respiration buccale sévère et chronique mène à un remodelage des voies aériennes supérieures, à une hypoxie alvéolaire, et à terme à de l’hypertension artérielle pulmonaire.

D. Conséquences cardiovasculaires

  • Chez les patients souffrant d’apnée obstructive du sommeil sévère, la respiration buccale chronique est un facteur de risque cardiovasculaire indépendant.

  • À long terme, la répétition des micro-réveils et de l’hypoxie intermittente liés aux apnées obstructives entraîne une élévation de la pression artérielle diurne : on parle d’hypertension artérielle systémique.

  • Chez ces patients, le risque d’accident vasculaire cérébral, d’infarctus du myocarde, et de mort subite durant le sommeil est significativement accru.

Solutions et traitements

Heureusement, il existe de nombreuses solutions pour corriger l’habitude de dormir la bouche ouverte et retrouver les bienfaits d’une respiration nasale nocturne.

A. Traitements posturaux et mécaniques

  • Une simple modification de la posture de sommeil peut suffire : dormir sur le côté plutôt que sur le dos empêche la chute postérieure de la langue. L’utilisation d’un oreiller cervical permet également de surélever la tête et de dégager les voies aériennes.

  • Le port d’une mentonnière ou d’une bande adhésive labiale pendant la nuit aide à garder la bouche fermée et à respirer par le nez de façon mécanique.

  • Des dilatateurs nasaux (ou stents) sont des dispositifs médicaux qui se placent à l’entrée des narines pour les maintenir ouvertes pendant le sommeil.

B. Traitements ORL, dentaires et maxillo-faciaux

  • En cas d’obstruction nasale, une chirurgie fonctionnelle ORL peut être indiquée : septoplastie correctrice de la cloison nasale, turbinectomie de réduction des cornets inférieurs hypertrophiés, ou amydalectomie.

  • La mise en place d’un appareil respiratoire type masque CPAP avec pression positive permet de pneumatiser les voies aériennes supérieures et de supprimer les obstacles obstructifs.

  • L’orthèse d’avancée mandibulaire repositionne la mâchoire inférieure vers l’avant pendant le sommeil, libérant ainsi le carrefour aéro-digestif supérieur.

  • En cas d’anomalies dento-maxillaires structurelles, une expansion maxillaire orthodontique ou un traitement orthopédique facial peut s’avérer bénéfique.

C. Rééducation fonctionnelle

  • La rééducation orthophonique permet un apprentissage à la respiration nasale diurne par des exercices spécifiques, et une réhabituation neuro-musculaire.

  • La kinésithérapie maxillo-faciale vise à assouplir les muscles masticateurs, à corriger les défauts de posture céphalique, et à retrouver une ventilation nasale par des manipulations douces.

D. Traitement de fond des facteurs irritants

  • L’arrêt complet du tabac est indispensable chez les patients présentant une respiration buccale chronique.

  • La prise en charge des éventuelles allergies sous-jacentes (acariens, pollens) par traitement médicamenteux ou désensibilisation permet de supprimer l’inflammation ORL obstructrice.

  • L’adaptation des traitements médicamenteux asséchants, comme certains antidépresseurs ou anxiolytiques, est parfois envisageable en remplaçant la molécule ou la voie d’administration.

Conclusion

Bien que très fréquente, la respiration buccale nocturne a des conséquences néfastes sur la santé, aussi bien à court terme par la sécheresse qu’elle entraîne, qu’à long terme par les affections ORL, pulmonaires et cardiovasculaires qu’elle favorise.

Heureusement, de multiples solutions thérapeutiques existent pour corriger cette habitude et retrouver les bienfaits d’une respiration nasale physiologique pendant le sommeil. Une prise en charge précoce et globale est recommandée devant toute respiration buccale persistante, avec une approche pluridisciplinaire ORL, pneumologique, dentaire et maxillo-faciale.

Le repos et la récupération fournis par un sommeil réparateur sont essentiels à une bonne santé. Dormir la bouche fermée et respirer par le nez sont des conditions indispensables pour garantir les bienfaits régénérateurs d’un sommeil de qualité.

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